Mme Ndèye Khaïba FALL a abordé en premier les principaux défis de la territorialisation des stratégies digitales, en précisant d’emblée que le Sénégal a été très en avance sur les questions de connectivité à l’internet, comparé à beaucoup de pays d’Afrique. Toutefois, quand on reste dans le champ de l’aménagement numérique des territoires, on passe de la logique mercantiliste à celle du développement territorial, qui relève de la responsabilité de l’Etat. C’est à ce niveau d’ailleurs que résident les défis de l’Etat du Sénégal, en ce qu’il existe des enjeux majeurs pour le développement et la modernisation des infrastructures publiques au niveau des territoires. Ce qui permet de régler ainsi les questions d’adaptabilité aussi bien sur les services proposés que pour les coûts par rapport aux besoins et capacités d’appropriation.
Concernant les défis, les panélistes proposent d’avoir une vision sur la connectivité réelle du pays. Pour ce faire, il faut travailler d’abord à avoir une cartographie qui mettrait en lumière tout le réseau fibre optique du Sénégal, ensuite, à identifier les activités qui se déroulent dans ces zones afin de mieux planifier le partage des infrastructures selon les besoins de chaque territoire. En effet, dans le principe de l’aménagement du territoire, il ne s’agit pas de mettre partout une connectivité de très haut débit, mais le défi est de pourvoir à chaque territoire la connexion dont les citoyens ont besoin pour mener à bien leurs activités.
A sa suite, Mme Banel SOW a évoqué la question de l’accessibilité et particulièrement celle du coût pour faciliter l’inclusion digitale. Elle estime que le coût n’est pas réellement un frein pour les citoyens, mais la question est plutôt de savoir si ces derniers ont des applications qui leur permettent de se transformer ou de transformer leurs activités économiques. Elle estime que la transformation digitale des terroirs résulte de l’intégration de la technologie et du numérique, qui modifie le processus dans l’ensemble des activités économiques locales. Cette transformation désigne l’intégration et l’utilisation des technologies numériques pour optimiser la gestion, le développement et la qualité de vie dans les terroirs. Par ailleurs, Mme FALL estime qu’il faut, au préalable, une modernisation des territoires à tous les niveaux afin de pouvoir accueillir certaines nouvelles infrastructures.
Abordant la question des pôles de développement territorial, les panélistes recommandent d’associer tous les territoires qui ont des spécificités en commun. Le rôle du digital sera de s’implémenter dans ces zones et de booster leurs activités économiques, accroître leur visibilité et favoriser la commercialisation des produits locaux. Cela nécessitera également un accompagnement territorial et une labellisation des produits de chaque territoire.
Évoquant les smart cities, les panélistes pensent que beaucoup de nos projets de smart cities ne sont pas adaptés à nos réalités socioculturelles et à nos économies. En lieu et place des financements orientés de parcs numériques, elles proposent le concept de smart gox, plus rapide et plus adapté à nos économies. Cela consiste à démarrer la transition digitale par l’identification de nos besoins réels au lieu de proposer des solutions transférées d’ailleurs. Au niveau territorial (dans les départements) nous avons déjà une base, avec les centres qui peuvent accueillir ces laboratoires. C’est en ce moment qu’on pourra relever les défis urbains, avec de moindres coûts.
En conclusion on peut retenir que la territorialisation des stratégies digitales fait référence à l’adaptation des stratégies numériques aux spécificités géographiques, culturelles et socio-économiques d’un territoire donné. Dans le cadre du Sénégal il faut privilégier la stratégie bottom up, tenant compte des besoins des territoires.
Dr Mohamadou Ibnou Arabe KONTEYE/PIED
